Afrika Strategies
Revue d'intelligence et d'Analyse

Thierno Lô : «Les grandes puissances n’ont plus besoin d’une conférence de Berlin pour la balkanisation de l’Afrique » 

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Ancien ministre de la république du Sénégal, Thierno Lô est le président de la coalition Aldiana qui regroupe plusieurs mouvements et formations politiques dont le sien, l’Alliance pour la paix et le développement (Apd). Membre de la grande coalition présidentielle, il est un très proche du président Macky Sall. Administrateurs d’un un groupe de presse, il se livre à Afrika Stratégies Frane à travers une belle interview.

 Sur l’échiquier politique sénégalais, le Ministre Thierno Lô est connu pour sa constance et son franc-parler. Ce natif de Darou Mousty, la seconde capitale du mouridisme après Touba, est un dinosaure du secteur privé où il a servi pendant 38 ans avant d’embrasser une carrière politique aux côtés du Président Abdoulaye Wade dont il fut le ministre conseiller de 2003 à 2005. Puis ministre de l’environnement et de la protection de la nature jusqu’en 2007. Tête de liste départementale du Parti démocratique sénégalais (Pds), il est élu député à l’assemblée nationale.  Après avoir conduit le code de l’urbanisme en sa qualité du président de la commission de l’urbanisme et de l’habitat, il rejoint, en 2009, le gouvernement en qualité de ministre de l’artisanat, des relations avec le secteur privé et le secteur informel. Dans cet entretien accordé à Afrika Stratégies France, le Ministre Thierno Lô, revient sur les raisons qui ont motivé son compagnonnage avec le Président Macky Sall et jette un regard sur l’actualité au Sénégal.

Qu’est-ce qui explique votre indéfectible soutien au président Macky Sall ?

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 Après son élection à la magistrature suprême en 2012, il m’a consulté. Le président Macky Sall et moi avions partagé le même gouvernement, lui premier ministre et moi, ministre de l’environnement. Ce qui fait qu’il connait mes capacités et la perception que les Sénégalais ont de moi. On lui a confié le pays et il voudrait que je l’accompagne. Ainsi, j’ai scellé avec lui une alliance basée sur des principes tels que l’amour de notre pays, la gestion de l’intérêt général au détriment de l’intérêt particulier. Ce qui fait que nous n’avons pas entretenu une relation de position et de pouvoir mais plutôt, d’impacter sur le Plan Sénégal émergent (Pse) qui est son programme. C’est ainsi que je l’ai soutenu jusqu’à ce qu’il soit réélu président de la république du Sénégal en 2019.

Comment appréciez-vous aujourd’hui, la victoire du président de la république ?

 La victoire du président de la République découle d’une chose qui est très simple. Un homme est allé à la rencontre de son peuple. Il a fait des promesses et a travaillé pendant sept ans. A la fin de son mandat, il est revenu auprès de ce même peuple à qui, il a présenté un bilan positif et déterminé un programme en perspective. Moi, je l’ai défendu parce que dans tous les secteurs du pays, il a fait quelque chose de concret. En plus, c’est un homme capable de mener le Sénégal vers le développement. Et j’ai vu au-delà du bilan qu’il n’y avait pas une politique alternative capable de me pousser à faire un autre choix que lui. Il s’y ajoute que c’est un jeune président de la république qui a la possibilité d’écrire l’une des plus belles pages de l’histoire politique du Sénégal. Cela s’explique par la bonne et simple raison que tous les présidents qui cherchent à se faire réélire, ne peut pas prendre de décisions impopulaires. Ils font des promesses pour un second mandat, conservent le fauteuil et ne gèrent que des intérêts particuliers.  Je me suis dit qu’il voudrait par sa jeunesse, marquer l’histoire politique du Sénégal. Et une fois débarrasser de toute forme de pression, pourrait au moins dire : « J’appliquerai toutes les réformes nécessaires parce qu’aucune d’entre elles ne va impacter négativement sur moi. Je ne ménagerais pas mes efforts pour résoudre tous les problèmes qui constituent des contradictions au niveau de la classe politique sénégalaise, du secteur privé pour conduire le Sénégal vers l »émergence. » Ainsi, il va écrire une belle page et l’histoire retiendra que la relève générationnelle n’est pas pire que les anciens. C’est sur cette base que nous l’avons accompagné. Les Sénégalais l’ont plébiscité à 58,26%. Maintenant, il nous reste à réaliser les promesses qui ont été faites aux populations.

Que dites-vous de l’opposition qui ne reconnait toujours pas la victoire de votre candidat ?

 Vous savez en Afrique, on a toujours une opposition qui conteste le fichier électoral. Après, elle va prendre part aux différentes élections pour se plaindre. Il y a eu des exceptions en ce qui concerne le Sénégal où en 2000 et 2012, nous avons eu deux grands hommes d’Etat qui ont montré l’exemple qu’Il faut souvent accepter la défaite parce qu’on eu des victoires. Malheureusement, on a une opposition des médias, du buzz et qui n’a pas  sur le terrain politique et qui ne prouve pas ce qu’il conteste. Je crois bien que si ces leaders de l’opposition qui refusent de se rendre à l’évidence des résultats issus  des urnes, ils ont des preuves en leur possession, rien ne les empêche de les rendre publiques. Par exemple, ils pouvaient convoquer une conférence de presse pour présenter les récépissés en leur possession, aux journalistes et aux observateurs qui ont supervisé le scrutin. Mais cette opposition qui a signé les procès verbaux dans les bureaux de vote et qui refusent d’introduire un quelconque recours auprès des juridictions assermentées n’a pas les instruments qu’il faut pour contester la victoire du président Macky Sall. J ne suis pas de ces politiciens qui sont aveuglés par une position partisane au point de ne pas dire la vérité. J(ai été dans les bureaux de vote et nulle part, on a signalé un cas de fraude. La vérité est qu’il y a un candidat qui a fait le tour du Sénégal pour présenter son bilan et un programme pendant que l’opposition était inerte et transparente.  Elle a préféré investir les réseaux sociaux plutôt que d’aller dans les coins reculés du Sénégal. Le président a gagné l’élection. L’opposition a le droit de contester ou boycotter l’appel au dialogue. A défaut de fournir les preuves de sa contestation, l’opposition a préféré écrire un livre blanc qui ne fait que reprendre de la théorie mais n’a pas prouvé des cas de fraudes avérés. C’est une opposition qui a encore une fois, versé dans la contestation et c’est dommage.

Le Dialogue est il possible entre pouvoir et opposition dans ce climat d’incompréhension ?

 Je crois qu’on peut aller prétendre au pouvoir mais si nous sommes animés par les mêmes principes de développer le Sénégal, nous devons aller à une main tendue du président de la république pour le dialogue. Une fois assis autour de la table, on peut poser des questions préalables et voir quels sont les consensus qui pourraient servir l’intérêt général de nos pays et des réformes sur les nouveaux défis qui nous interpellent en particulier et l’Afrique en général. Et s’il y a élection, on puisse présenter des programmes et laisser les citoyens choisir et valider ce qui leur a été proposé. On devra permettre qu’il y ait un débat sain avec des programmes et de meilleures propositions afin que nos pays africains puissent se mettre ensemble. Il n’y a plus d’organisations des droits de l’homme et encore moins, des traités ou accords signés. La seule chose qui existe, est que les gens sont en train de gérer des intérêts particuliers. C’est-à-dire que chaque Etat utilise ce qui est à sa disposition pour préserver ses intérêts. C’est ce qui est à l’origine des conflits entre les Etats-Unis d’Amérique et la Chine. C’est la cause du conflit avec l’Iran et de tout ce qui se passe en Libye, en Syrie. C’est la conquête des ressources minières. Les grandes puissances n’ont plus besoin de rééditer la conférence de Berlin pour la balkanisation de l’Afrique. Elles essaient de trouver quelqu’un qui pourrait leur donner leur part du gâteau. Le fond du problème, c’est comment gérer les ressources minières qui s’épuisent mais ne se reproduisent pas. L’Amérique en regorge. Alors qu’il faut tout faire pour conserver le potentiel destiné aux générations futures et profiter des ressources minières des pays d’Afrique ou d’autres pays où elles ont la possibilité de changer les règles du jeu. Par rapport à ça, pourquoi on ne se mettrait pas ensemble pour que l’on puisse sortir de nos micro-Etats avec nos frontières poreuses et bousculer et détruire la tradition qui consiste dire qu’ils sont partis mais ont laissé les Africains choisir. Cela veut dire que ceux qui sont là pour reprendre leur mot d’ordre sans que les bâillonnettes ne sortent sous le contrôle des lobbies, c’est une pression que subissent nos dirigeants. Nous devons réaliser les Etats-Unis d’Afrique avec une armée forte et un marché commun et la consolidation de nos ressources minières. C’est sur cette base que j’avais accompagné le président Abdoulaye Wade qui voulait le faire. Ils ont tout fait pour le détruire avant qu’il n’éveille la conscience des peuples d’Afrique. Aujourd’hui, on a un jeune président de la république qui a la possibilité de s’adosser sur son peuple pour libérer d’abord le Sénégal avant de montrer la voie au reste du continent, pour dire : « ça suffit. »

Propos recueillis à Dakar par ALmami Camara, Afrika Stratégies France

 

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