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Noël Bataka : « Nous allons, grâce au PND, créer 1000 entreprises agricoles, pousser la diaspora à investir et multiplier des opportunités pour la jeunes »

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La quarantaine révolue, sobre et accessible, l’atout du jeune ministre togolais de l’agriculture, de la production animale et halieutique n’est pas que d’être un ingénieur agronome. Il est surtout un homme de terrain. Précédemment coordonateur du Mécanisme incitatif du financement agricole fondé sur le partage de risques (MIFA) qui est le projet le plus ambitieux que le pays a connu dans le secteur agricole, il connaît le Togo profond. Sa méthode : faire confiance aux collaborateurs (l’un assistera d’ailleurs à cette interview) mais surtout mériter la confiance du Chef de l’Etat pour qu’il continue à compter sur d’autres jeunes. Mesuré mais déterminé, Noël Bataka veut, au-delà de ses compétences évidentes, baser sa stratégie sur l’écoute et la concertation. En marge du lancement du Plan national de développement (PND), il reçoit l’équipe d’Afrika Stratégie. Trop matinalement comme à ses habitudes de lève-tôt !

Le Plan national de développement (PND) vient d’être lancé par le gouvernement togolais avec une place prépondérante pour l’agriculture. Vous êtes depuis un mois ministre de l’agriculture. Quelles sont vos urgences ?

A court terme, il est question de préparer la campagne agricole pour assurer une production en quantité et en qualité suffisante pour la sécurité alimentaire. Ensuite, à moyen terme, veiller à réduire le déficit de la balance agricole commerciale. Le PND qui est lancé aujourd’hui par le Chef de l’Etat donne l’impulsion pour une transformation agricole à travers un changement de paradigme. La politique, entre temps focalisée sur l’accompagnement à la production, est tournée aujourd’hui vers l’accompagnement à l’amélioration des revenus des producteurs afin de lier l’agriculture aux besoins du marché et surtout, aider les producteurs à saisir efficacement les opportunités. On quitte en quelque sorte l’agriculture de production vers celle du business, de l’industrie et de la transformation garantissant une valeur ajoutée conséquente.

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La politique togolaise associe davantage la jeunesse. Le Président de la République semble donner une place de choix aux jeunes. Ne craignez-vous pas qu’ils ne soient pas suffisamment motivés puisque l’exode rurale bat son plein ?

Le tout dépend du changement de paradigme. L’agriculture aujourd’hui doit être orientée et construite pour inciter les jeunes par une modernisation qui prend en compte la transformation et l’industrialisation. Dans la nouvelle vision du Chef de l’Etat, l’agriculture est un nid d’opportunités pour les jeunes, tout au long de la chaine de valeurs, dans une cohérence qui ne peut qu’attirer les jeunes, leur offrir des facilités notamment l’accès aux crédits pour qu’ils n’aient rien à envier aux jeunes qui sont en milieu urbain avec tous les avantages que cela peut comporter. Tout cela passe par la valorisation des atouts dans d’autres maillons que la production pour multiplier les opportunités.  Car en matière de production, le Togo dégage déjà chaque année 100 à 140.000 tonnes de vivriers. Alors que contrairement à la plupart des pays qui nous entourent, 4% de réserve de la production nous met largement en sécurité alimentaire.

Est- ce que le fait qu’il ait un excédent important n’est pas plutôt dû à l’abandon des produits de rente en faveur de ceux vivriers ? Le coton étant bien malade en ce moment…

Le Togo n’est pas aussi malade que vous semblez le dire. La production est passée depuis quelques années de 27.000 à plus de 100.000 tonnes. Le coton reste le premier produit d’exportation en termes de valeurs. Mais au-delà, nous avons introduit de nouveaux produits de rente notamment l’anacarde et le soja. Le café cacao connaît un rebond important. Cela concerne aussi l’élevage qui est passé de 10 millions de tête de volailles à plus du double.

A voir les données et chiffres, on a l’impression que l’agriculture est plus qu’en forme. Et l’un des reflets c’est le Mécanisme incitatif de financement agricole fondé sur le partage de risque (MIFA) dont vous étiez coordonateur qui est un succès. La phase pilote est finie. Quelle est la suite ?

La phase pilote visait à tester des instruments. Les résultats sont là, sur tous les sites, il y a eu augmentation sensible du rendement. Et le nombre de bénéficiaires a été doublé. Le gouvernement est donc conscient que ce projet est une chance qu’il faille généraliser sur l’ensemble des filières. Il vise surtout à lier les producteurs avec le marché pour transformer leurs produits pour qu’ils en jouissent.

Et les innovations plus précisément…

Le MIFA est aujourd’hui une manière efficace d’amener les organisations agricoles à mieux se professionnaliser avec l’accès aux marchés et aux financements comme piliers principaux avec une stratégie de liaison capitale. Et je peux vous dire que la principale innovation est de créer des entreprises dans le secteur agricole en structurant la chaine de valeur. Nous allons, grâce au PND, créer 1000 entreprises agricoles, pousser la diaspora à investir et multiplier des opportunités pour la jeunes.

Le premier problème du secteur agricole est l’insuffisance d’engins agricoles. Vous avez une solution ?

Bien sûr. C’est l’une de nos préoccupations mais il faut garantir le marché pour augmenter l’offre. Il ne sert à rien de produire sans identifier les besoins.

Votre nomination est perçue par vous comme une marque de confiance. C’est sans doute aussi un défi…

C’est surtout un défi et cette confiance transcende votre âge et précipite votre obligation de maturité. C’est donc une occasion que me donne le Chef de l’Etat mais aussi à toute la jeunesse d’une manière ou d’une autre. Et j’en mesure le poids et l’obligation de résultats.

Propos recueillis par Max-Savi Carmel et Brice Kodjo, envoyés spéciaux à Lomé, Afrika Stratégies France

 

 

 

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