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Revue d'intelligence et d'Analyse

Malgré les difficultés, l’Afrique se mobilise pour aller aux JMJ

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L’organisation, le financement et l’obtention de visas constituent un parcours de combattant pour les quelque 600 jeunes Africains qui se rendront aux Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) de Lisbonne, fin juillet 2023. Les autres suivront l’événement via les réseaux sociaux et certains pays organisent, sur le même thème, les JMJ en parallèles de Lisbonne.

Max Savi Carmel pour cath.ch

Chaque semaine, Radio Immaculée au Bénin offre trois quart d’heure à la jeunesse à travers l’émission, «JMJ». Elle n’est pas que consacrée aux JMJ comme peut le faire croire son nom, mais il s’agit «d’une opportunité dédiée aux jeunes par la radio pour aborder divers sujets», observe son directeur, le frère Fiacre Marie Agassounou.

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A quelques semaines des JMJ de Lisbonne, prévues du 1erau 6 août, cette émission prend une place particulière: elle sera une des vitrines de ce grand rendez-vous que François donne aux jeunes du monde entier dans la capitale portugaise. Togo, Burkina Faso, Niger, Guinée, Cameroun et ailleurs sur le continent, les services catholiques de jeunes s’organisent pour que le continent soit «dignement représenté et ouvre ses cultures au monde», comme le souhaite l’abbé Agbalenyo.

Le Togo boucle ses préparatifs
Début juin. Paroisse du Christ Roi de Nyekonapkpoe, quartier résidentiel de Lomé. En recevant cath.ch, Dominique Rosario Agbalenyo semble soulagé, «il y a plusieurs années que le Togo n’a plus envoyé de représentants aux JMJ». Le Coordinateur national de la pastorale des jeunes auprès de la conférence épiscopale du Togo, qui a dû se rendre seul à Panama en 2019, aura la joie de conduire une délégation officielle.

Le Père Dominique Rosario vient d’entamer les démarches d’obtention de visas pour sa trentaine de délégués | © Max Savi Carmel
Il vient d’entamer auprès du consulat de France, faute d’une ambassade du Portugal à Lomé, les démarches d’obtention de visas pour sa trentaine de délégués. Et depuis plusieurs mois, chaque dernière semaine du mois, l’équipe des potentiels participants se retrouve au Siège de la Conférence épiscopale. «Une manière de nous préparer spirituellement», confesse Dominique Rosario. Il insiste sur l’importance pratique, pour ces pèlerins «de découvrir à distance Lisbonne mais aussi de s’apprêter à ouvrir leur culture au monde et aux autres participants».

Au Togo, les frais de participation, environ 2000»�� par personne, sont à la charge des jeunes. Il s’agit notamment de six prêtres, d’une religieuse et d’une vingtaine de jeunes venus de quatre des sept diocèses que compte le pays. «Malgré nos diverses demandes, nous n’avons obtenu aucun financement» regrette l’abbé Rosario. Et comme dans beaucoup de pays africains dont la participation est limitée, le Togo «fera vivre par des interconnexions et les réseaux sociaux» l’événement aux milliers de jeunes catholiques restés au pays. «Ceux qui ont la chance de se rendre à Lisbonne le font au nom de tous», insiste l’aumônier et selon lui, «ils doivent en faire profiter largement les autres» conclut celui dont la délégation arrive au Portugal le 25 juillet. Car les participants togolais aux JMJ prendront part à la semaine des diocèses, dans l’archidiocèse d’Evora avant les JMJ proprement dites avec le pape pour qui «nous avons appelé tout le monde à prier intensément», rappelle le Père Dominique Rosario Agbelenyo.

Niger, Burkina Faso, Cameroun, Guinée, «une source d’espérance»

Le cardinal Philippe Ouédraogo appelle son diocèse à accompagner «les JMJ dans la prière», estimant qu’elles seront «source d’espérance». Alors que les attaques terroristes s’enchainent dans le Sahel depuis de nombreuses années, le Burkina Faso et le Niger qui ont une délégation conjointe se contenteront de 75 participants, «ce qui est déjà assez satisfaisant», selon un prêtre du diocèse de Niamey.

Les jeunes Togolais «doivent s’apprêter à ouvrir leur culture au monde et aux autres participants», indique le Père Rosario | © Max Savi Carmel
A Ouagadougou, le secrétaire de la Commission épiscopale Jeunesse et Enfance insiste sur l’importance pour «chaque délégation de faire vivre les JMJ aux autres jeunes du pays». D’ailleurs, «comme les autres années, le Burkina Faso et le Niger le feront à travers l’envoi d’images et de vidéos sur les réseaux sociaux», promet l’abbé Valery Sakougri qui mentionne aussi des directs sur une plateforme Facebook dédiée. Au Cameroun, autre pays menacé par les djihadistes, Sr Anne Marie Ekomo est «très heureuse» d’être du voyage: «Encadrer les jeunes aux JMJ est ma contribution au développement de l’Eglise», confie à cath.ch la secrétaire de l’évêque d’Edéa (région du Littoral). Elle pense d’ailleurs que l’Afrique organisera l’événement dans le futur. «Si le continent a pu organiser une coupe du monde de football, il peut organiser des JMJ», déduit la religieuse. Sr Anne Marie devrait arriver dans la capitale portugaise «fin juillet».

En Guinée, pays en crise depuis le renversement par un coup d’état militaire du président Alpha Condé en 2021, Maïmouna Baldé n’a pas attendu d’être choisie par son diocèse. La jeune sociologue s’est inscrite d’elle-même en ligne. «J’ai eu de la chance et j’ai obtenu une inscription d’un clic», se réjouit-elle. Compte tenu de ses revenus plutôt stables, elle n’a pas eu de mal à décrocher un visa au consulat du Portugal. «J’ai tout de même fourni une cinquantaine de documents différents et dépensé 711»�� en divers frais», détaille cette fidèle de la cathédrale Sainte-Marie de Conakry. Car l’obtention de visa étant le principal handicap, beaucoup de pays ont renoncé à se rendre au Portugal.

Au Maroc et en Tunisie, des JMJ «à distance»
A Tanger, le Père François Saleh Moll est au four et au moulin. Les inscriptions sont presque finies, «nous entamons maintenant les Journées paroissiales JMJ», confie-t-il. Car le Maroc n’ira pas à Lisbonne. «Depuis 2000, nous n’envoyons plus de délégation», regrette le Père Nourrisat. Le curé de la cathédrale de Rabat explique cette décision par le fait que «20 des 40 participants des JMJ de Rome ne soient pas revenus au Maroc». Du coup, cette année, les JMJ seront «à distance».

Pour le Père Saleh Moll, principal organisateur, «110 personnes sont attendues» et tout se passera autour du même thème qu’à Lisbonne: «Marie se lève et partit en hâte» et aux mêmes dates, du 1er au 6 août. Même s’il s’inquiète «des difficultés à avoir la transmission en direct en langue française» via des écrans géants. François Saleh Moll a d’ailleurs écrit à KTO TV et espère que «la télévision catholique donnera rapidement une suite». L’idée de jeunes regroupés en paroisse et suivant, depuis Rabat ou Tanger, les JMJ en direct enthousiaste les jeunes qui se bousculent sur la plateforme d’inscription.

Tout comme le Maroc, «la Tunisie n’enverra pas de délégation» selon le Père Moreno, curé de la cathédrale de Tunis. Les fidèles du seul diocèse que constitue toute la Tunisie devront se contenter de suivre l’événement à distance et sur les réseaux sociaux. Une situation qui repose la question de l’organisation des JMJ par l’Afrique. L’idée fait son chemin au sein de l’épiscopat africain, malgré des réticences que le Vatican explique par l’insécurité et le déficit d’infrastructures adaptées. (cath.ch/msc/bh)

MAX-SAVI Carmel, pour Cath.ch

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